12 mai 2008

 

Image des sciences : Michel Serres

L'image des sciences est aujourd'hui quelque peu dévalorisée.
Les scientifiques, dans l'imaginaire de quelques uns,de plus en plus nombreux,je le crains, seraient des esprits rigides,peu attirés par la littérature,la philosophie ou les arts, anti-écolo, peu soucieux des droits de l'homme, etc...

Michel Serres est né en 1930 à Agen. D’origine gasconne modeste, il entre à l’École Navale ( école scientifique ) en 1949, puis à l’École normale supérieure en 1952 ; il passe l’agrégation de philosophie, sert dans la Marine nationale puis enseigne définitivement la philosophie dans diverses universités. Il est membre de l’Académie française depuis 1990 .
Parmi toutes ses œuvres, citons Hermès (de 1969 à 1980), Genèse (1952), Le contrat naturel (1990), Le tiers-instruit (1991), Eloge de la philosophie en langue française ( 1995).Rameaux( 2004).
Petites chroniques du dimanche soir( 2006) ; L'art des Ponts Homo pontifex (2006) ;Le mal propre : polluer pour s'approprier ? ( 2008.)

Une réflexion sur les sciences traverse toute votre œuvre. Vous avez d’abord suivi des études scientifiques.Comment avez-vous été amené à passer de l’Ecole navale à la philosophie ?

Michel Serres - Ne croyez pas que les questions concernant l’éthique de la science soient nouvelles. Pour ne prendre qu’un exemple : au lendemain d’Hiroshima, lorsque la physique a produit l’arme de destruction massive, toute ma génération s’est interrogée sur l’éthique de la science. Plusieurs physiciens sont devenus biologistes à cause de la bombe atomique. Cet événement a retenti sur le champ de recherche de toute une génération. Quant à moi, qui avais commencé à travailler dans le champ des mathématiques et de la physique théorique, ce contrecoup a fait de moi un philosophe. Je suis un fils d’Hiroshima.

Certes, je n’avais que quinze ans lors de l’explosion de la bombe. Mais mes professeurs en avaient vécu le choc et m’ont influencé. C’est une fois entré à l’Ecole navale que j’ai découvert la violence de l’arme scientifique. J’ai démissionné pour réorienter mes études. Il y avait dans ma démarche comme une forme d’objection de conscience.

Pourquoi avoir choisi Leibniz comme premier objet de vos recherches philosophiques ?

Michel Serres - Ce choix est en partie circonstanciel, mais pas totalement. J’ai été témoin de cette révolution qu’a représentée le partage entre mathématiques modernes et mathématiques classiques ; elle impliquait un véritable débat sur les questions de connaissance. Leibniz, mathématicien allemand et philosophe de langue française, avait été le premier contemporain d’une telle révolution scientifique. Je me suis fait philosophe pour une révolution morale, et mon premier travail s’est attaché à une révolution scientifique, les deux impliquant une philosophie. Ce sont donc des raisons à la fois contemporaines et absolument essentielles au problème de la connaissance...

Extrait d'une Interview donnée à la revue Projet en Juin 2003.
La suite de l'interview ici

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